1000 Répliques adressées à  Jean-Marie Piemme

Réplique 0859

Par Sylvie Landuyt

Je suis petite, j'ai six ans, non, je ne dois pas entrer, pas encore. Derrière la porte, il y a papa et maman et un petit théâtre de marionnettes. Le spectateur n'a pas le droit de voir comment papa et maman arrangent tout pour lui, et moi, je suis la spectatrice. Et maintenant voici que Guignol tape sur le gendarme. Guignol, c'est maman, je reconnais sa voix ; et papa, c'est le gendarme, parce même quand ce n'est pas les marionnettes, il est gendarme. Enfin, chef gendarme. Dans la vraie vie, c’est lui qui bat maman « ferme ta gueule, espèce de salope », qu'il dit, parce que maman aime un autre homme et qu'elle dit que gendarme, c'est vraiment une vie de con. J'aime mieux maman que papa, si je dois choisir, ce sera maman. D'ailleurs maman dit souvent je ne te laisserai jamais à ce débile mental. Il y a aussi mon frère qui devrait être là, mais il est mort l'année dernière, papa et maman ne voulaient pas que je le voie, mais la nuit je me suis levée, je suis descendue, j'ai vu qu'il était tout bleu, je lui ai parlé tout doucement, tout bas, « Michel, c'est moi », pour ne pas réveiller papa et maman, car une fois qu'ils étaient réveillés, ils avaient tendance à pleurer. Donc très doucement j'ai dit : frère tout bleu, si tu veux je te donne ma poupée, je promets aussi de retenir toutes les histoires des marionnettes et de te les raconter chaque soir avant d'aller dormir. Puis je lui ai donné un bisou. Il était tout froid. Bouge pas, je vais te chercher une écharpe, j’ai dit.

Jean-Marie Piemme
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